Pour beaucoup de scientifiques, ces expériences ne sont rien d'autre que de simples hallucinations produites par un cerveau agonisant qui ne méritent pas qu’on leur accorde plus d’attention. Pourtant, sans tomber dans l’autre extrême qui consisterait à voir dans les NDE la preuve d’une vie après la mort, un examen un peu plus poussé montre à l’évidence que les NDE constituent un phénomène bien plus intéressant que n’importe quel rêve ou hallucination, dont l’étude nous apprendra sans aucun doute énormément sur la nature de la conscience humaine et les mécanismes de l'esprit. Un des aspects les plus surprenants de cette expérience est peut-être la clarté de pensée et de conscience, ainsi que la précision de la mémoire qui lui sont associées. En effet, même si beaucoup de NDE se produisent sans que le témoin ne souffre ni d’hypoxie(1) ni d’hypercapnie(2), beaucoup sont aussi survenues lors d’arrêts cardio-vasculaires, parfois en plus sous anesthésie, ou lors de noyades, c’est-à-dire à un moment ou le cerveau souffre d’un manque d’oxygène, ainsi que de glucose dans le cas d’un arrêt cardiaque, qui sont tous deux essentiels pour que les neurones fonctionnent. Tout se passe donc comme si l’expérience était indépendante de l’état fonctionnel du cerveau ou comme s’il existait une zone du cerveau qui soit insensible au manque d’oxygène, de glucose et à l’anesthésie ! En outre, l’aspect "curatif ou réparateur" que peut revêtir la NDE ou les modifications à long terme de la personnalité des témoins sont à eux seuls une source d’interrogations pour la psychologie. Mais les NDE soulèvent une foule d’autres questions. Notamment, pourquoi seulement 30% des gens qui se sont trouvés à un moment ou à un autre en état de mort imminente font une NDE ? Est-ce que tout le monde peut vivre une NDE et est-ce que 70% des personnes interrogées auraient seulement oublié l'épisode ou bien n'oseraient pas encore en parler ? Y a-t-il un profil type, des raisons physiologiques ou psychologiques prédisposant à vivre une NDE ? Sans parler de l’acquisition, parfois difficilement explicable, de certaines informations au cours de l’expérience qui ne pouvaient pas être connues au préalable par les témoins, ou bien de l’apparition de facultés psychiques particulières consécutivement à l’épisode de mort clinique. Beaucoup d'hypothèses psychologiques ou physiologiques ont été proposées. La grande majorité de ces hypothèses a été élaborée un peu hâtivement sans aucune étude approfondie du phénomène. Les autres, bien qu'intéressantes, ne rendent malheureusement compte que de quelques aspects de l'expérience. Une véritable théorie des NDE devra pour être valable pouvoir expliquer l'ensemble du phénomène. Cependant ces hypothèses sont utiles dans la mesure où elles permettent d'établir des parallèles avec des états déjà connus et définissent ainsi quelques points de départ pour une recherche objective. Hypothèses psychologiques Plusieurs hypothèses ont été proposées pour rendre compte d'un besoin du "Moi" de se protéger face à l'imminence de sa propre mort en se réfugiant dans un monde de fantasmes construit à partir de croyances conscientes et/ou inconscientes. Cependant, comme nous le verrons dans le paragraphe suivant, il semble que beaucoup d'autres chemins conduisent au même état de conscience très particulier qui se produit chez les personnes frôlant la mort, chemins qui ne correspondent en rien à un besoin de se protéger d'une réalité devenue trop angoissante. Par contre, il est vrai que les NDE se déroulent toujours selon un schéma constant et tous les récits contiennent un grand nombre de symboles universels (le passage, la lumière, Dieu etc.) ce qui pourrait suggérer un rôle important de la psyché dans le phénomène. La plupart du temps, ces symboles sont sans aucun rapport avec les croyances des témoins et ceci n’est pas sans rappeler la notion d’archétypes développée par Carl Jung (1971) qui représenteraient des images primordiales appartenant à un inconscient collectif. D’après Jung, il existerait autant d’archétypes que de situations typiques dans la vie. Il ne serait donc pas surprenant de trouver des archétypes liés à la mort. Bien que Jung lui-même ait vécu une NDE et ne l’interprétât pas par rapport à l’inconscient collectif, certains de ses adeptes ont vu dans la NDE une imagerie archétypale déclenchée par l’approche de la mort. Cette théorie est intéressante et contient probablement une part de vérité, bien qu’elle ne puisse pas rendre compte de tous les aspects de l’expérience. D’autre part, elle ne peut pas constituer une explication suffisante en soi, étant donné que la notion d’archétype, qui implique la présence de structures psychophysiologiques préexistantes à notre naissance, est une théorie qui n’a elle-même jamais été démontrée.